Aux États-Unis, une quinzaine de diplomates et universitaires s’insurgent contre un titre décerné par l’université d’Harvard à la première dame du Zimbabwe.
Il y a quelques jours, la prestigieuse université américaine a nommé Auxilia Mnangagwa – l’épouse de l’actuel président Emmerson Mnangagwa – ambassadrice honoraire pour le développement de la santé sur le continent. Une nomination inquiétante selon ces personnalités américaines, qui ont publiquement appelé l’université à retirer le titre décerné.
Plus de quinze diplomates – dont les quatre derniers ambassadeurs américains au Zimbabwe- ont signé cette lettre ouverte à l’université d’Harvard. Dans leur courrier, adressé au directeur du projet, de la faculté de médecine, ils font part de leur indignation.
« S’associer à l’épouse du président Emmerson Mnangagwa et à son régime autoritaire nuit à l’image d’Harvard. Et à ses efforts pour promouvoir des acteurs de la santé sur le continent », estiment les signataires.
Stratégie de communciation
Jeffrey Smith, universitaire et instigateur de cette lettre ouverte, estime que « bien souvent les régimes autoritaires, comme celui au Zimbabwe, tentent d’utiliser de prestigieuses institutions internationales, comme Harvard, pour redorer leur image, pour détourner l’attention des violations des droits de l’homme, des problèmes sociaux que connait leur pays ».
Il cite notamment comme exemple « le fait que les docteurs ne soient pas payés, qu’ils manifestent, que leur collègue ait été enlevé, torturé et abandonné au bord de la route. Ces pays utilisent ces institutions pour détourner l’attention. C’est exactement ce qui est en train de se passer ».
« Ce qu’il faut comprendre, ce que ce titre décerné par Harvard à la première dame fait partie d’une stratégie de communication plus large, lancée par le gouvernement, poursuit l’universitaire. Aujourd’hui, le Zimbabwe travaille avec trois des plus grosses boites de communication à Washington. Le gouvernement zimbabwéen leur verse d’importantes sommes d’argent, alors que pendant ce temps, les hôpitaux ne sont pas équipés, les docteurs ne sont pas payés, l’économie continue de se détériorer. Et plutôt que de régler ses problèmes, ils préfèrent financer des titres honorifiques bidon. »
« Un véritable paradoxe »
Pour Rejoice Ngwenya, analyste politique zimbabwéen, ce n’est pas le moment de distribuer des distinctions, surtout pas à des acteurs politiques. « Le secteur de la santé est en pleine crise au Zimbabwe. Il y a des épidémies, les hôpitaux n’ont pas de médicaments, pas d’eau, pas d’électricité. Les médecins du secteur public sont en grève, un de leur membre a récemment été enlevé. Cette distinction décernée à la première dame est un véritable paradoxe. »
Les diplomates américains demandent à ce que ce titre d’ambassadeur honorifique soit retiré à la première dame.
« Auxilia Mnangagwa est en droit de recevoir ce titre pour sa lutte contre le cancer chez les femmes », ont répondu les autorités zimbabwéennes. Et l’appel de ces diplomates américains est « entaché de haine, de jalousie et de racisme ».
Par RSA Avec Africa24monde