La plainte dans l’Affaire NGNAMANKALA contre Okoumba révèle les faux-semblants d’un pouvoir gabonais en pleine transition, où tensions et ambiguïtés politiques se dévoilent peu à peu.
Par Anne-Marie Dworaczek-Bendome | Publié le 15 octobre 2024 | Temps de lecture : 3 minutes
La récente plainte opposant Bernard NGNAMANKALA contre Wilfried Okoumba révèle des tensions politiques significatives au Gabon. Au cœur de cette controverse se trouvent des questions d’intégrité, de pouvoir et de manipulation qui méritent d’être examinées de près. Alors que le pays tente de se reconstruire après le coup d’État du 30 août 2023. La procédure en cours devant une juridiction française souligne la fragilité et l’ambiguïté qui entourent la transition politique, teintée de faux-semblants et de duplicité, mise en place depuis cette date fatidique.
Un paysage politique tumultueux
Il y a quatre mois, précisément, le samedi 1ᵉʳ juin 2024, à Croissy-Beaubourg, en banlieue parisienne (Seine-et-Marne). Lors d’une rencontre entre les Gabonais de France et le général-président Oligui Nguema, Wilfried Okoumba, homme d’affaires et figure politique au discours incisif, échangeait des accolades avec le président de la Transition, Brice Clotaire Oligui Nguema. Pourtant, bien avant cette réunion fraternelle, comme révélé hier, Bernard NGNAMANKALA, Directeur général de la DGDI (Direction générale de la documentation et de l’immigration), avait déjà déposé plainte contre lui, entre avril et mai 2024. Ce contraste frappant entre cette cordialité affichée et les tensions latentes soulève une question cruciale : quelle est la véritable nature de ce pouvoir en place ? Assiste-t-on à une mascarade, un jeu dont seuls quelques initiés connaissent les règles et les finalités ?
Okoumba : le porte-voix de la dissidence
Wilfried Okoumba, alias Kamitatou Lénine d’Andjogo, s’illustre depuis la chute de l’ancien pouvoir par son franc-parler et son engagement. Son audace le place en première ligne des critiques contre les abus de pouvoir et les incohérences au sein du gouvernement militaire. Il n’hésite pas à interroger les représentants du régime, qui tiennent les rênes de l’État officiellement depuis l’investiture d’Oligui Nguema le 4 septembre 2023, les qualifiant de « vendeurs d’illusions ». Dans ce contexte, ses déclarations se muent en un véritable cri de ralliement pour une communauté en quête d’authenticité, de transparence et de vérité.
La plainte de NGNAMANKALA : un acte d’intimidation ?
La démarche de NGNAMANKALA, qui a voyagé en France pour déposer plainte, interpelle. À l’écoute des enregistrements audios d’Okoumba, on comprend qu’il s’agit d’un véritable combat pour la vérité. Alors que la situation se dégrade, le général-président Oligui ne peut ignorer cette confrontation, d’autant plus qu’il a personnellement remis à Okoumba une somme de 5 000 euros lors de leur rencontre, lui demandant expressément de rentrer au Gabon.
Brice Clotaire Oligui Nguema
Le président Oligui Nguema ne pouvait ignorer qu’avant sa rencontre avec Wilfried Okoumba, l’un de ses collaborateurs avait émis une plainte contre lui. En effet, pour avoir été assigné en justice en France par des personnalités gabonaises de premier plan, l’appareil judiciaire doit informer le ministère des Affaires étrangères, qui fait le nécessaire pour alerter le pays. J’ai constaté cela avec des personnalités politiques, telles qu’Alain Claude Bilié Bi Nzé et Louis-Gaston Mayila, qui avaient également déposé des plaintes contre moi (Anne Marie DWORACZEK-BENDOME).
L’affaire NGNAMANKALA contre Okoumba ressemble à un jeu de rôle, où l’un rassure, c’est-à-dire le président Oligui Nguema, tandis que l’autre met l’estocade alors qu’on ne s’y attend pas, c’est Bernard NGNAMANKALA. Chacune de ces actions survient à des moments clés, illustrant une orchestration bien rodée. Aujourd’hui, alors qu’Ali Bongo a été écarté du pouvoir, cette manière de faire rappelle de mauvais souvenirs et souligne un fait crucial : le pays est dans la continuité malgré le coup d’État du 30 aout 2023.
Le double discours des nouvelles autorités
D’un côté, le régime encourage le retour des Gabonais au pays, leur promettant un avenir radieux, tandis que de l’autre, il s’en prend à ceux qui osent s’exprimer. Cette dichotomie illustre la perversion d’un discours qui fait semblant d’être inclusif, tout en réprimant la dissidence. La mise en examen potentielle d’Okoumba serait un signal alarmant pour tous ceux qui refusent de céder aux illusions prometteuses d’un changement. Faire semblant est devenu le mot d’ordre dans un contexte dans lequel les mots n’ont plus de valeur.
Un avenir incertain pour la politique gabonaise
Alors que la saga NGNAMANKALA-Okoumba débute, le Gabon se retrouve à un carrefour. Les actions entreprises par le gouvernement peuvent paraître rassurantes en apparence, mais elles semblent cacher des vérités plus sombres. La peur d’une répression, à l’instar de celle subie par Landry Washington sous Ali Bongo lors de son retour des États-Unis, pèse sur les esprits de beaucoup. Ainsi, la lutte pour la vérité et l’authenticité se poursuit, et l’avenir politique du Gabon reste suspendu à un fil fragile. L’engagement d’Okoumba pourrait devenir le catalyseur d’un mouvement plus large, mais il est crucial de rester vigilant face aux perversions du pouvoir en place.