Oligui Nguema : Le Gabon à l'aube d'un référendum constitutionnel décisif
Oligui Nguema : Le Gabon à l'aube d'un référendum constitutionnel décisif

Le Gabon se prépare à un référendum constitutionnel crucial, mais l’incertitude sur son contenu suscite inquiétude et incompréhension.

Oligui Nguema : Le Gabon à l'aube d'un référendum constitutionnel décisif
Oligui Nguema : Le Gabon à l’aube d’un référendum constitutionnel décisif

Entre espoir et incertitude

Le Gabon s’apprête à vivre un moment charnière de son histoire avec l’organisation imminente d’un référendum constitutionnel. Cette consultation populaire, étape cruciale de la transition post-coup d’État, se déroule sous l’égide du général Oligui Nguema. Paradoxalement, malgré les appels véhéments à voter « oui« , les Gabonais demeurent dans un brouillard épais quant au contenu précis de ce référendum. Cette opacité engendre un sentiment palpable d’inquiétude et d’incompréhension au sein de la population, créant un climat de tension et de scepticisme.

La genèse d’une transition politique inédite : entre rupture et continuité

Le renversement spectaculaire du régime Bongo, le 30 aout 2023, après 56 ans de règne familial, a catapulté le général Brice Oligui Nguema à la tête d’une transition aux contours encore flous. Le Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI), organe né des cendres du coup d’État, a rapidement esquissé un chronogramme ambitieux. Ce plan prévoyait initialement l’adoption d’une nouvelle constitution entre novembre et décembre 2024. Cependant, la célérité avec laquelle ce calendrier a été établi soulève des questions sur sa faisabilité et sa pertinence dans un contexte politique aussi volatile.

Le dialogue national inclusif : catalyseur démocratique ou simulacre de concertation ?

Le Dialogue national inclusif (DNI), organisé du 02 au 30 avril 2024, se voulait être le creuset d’un consensus national, un forum dans lequel toutes les voix du Gabon pourraient s’exprimer librement. Néanmoins, la métamorphose inattendue du Comité de surveillance et de suivi en un Comité constitutionnel national a déclenché une onde de choc dans l’opinion publique. Cette manœuvre, perçue par beaucoup comme une tentative de contourner des conclusions du DNI, a sérieusement ébranlé la confiance dans l’intégrité du processus transitionnel. Les critiques dénoncent une démarche qui rappelle les pratiques opaques du régime précédent.

L’imbroglio constitutionnel et ses ramifications

La transformation tant attendue du Parlement en Assemblée constituante, initialement prévue pour juin 2024, reste à ce jour lettre morte. Ce retard significatif exacerbe les tensions politiques et alimente les spéculations les plus folles sur les véritables intentions du pouvoir transitoire. L’absence de progrès tangibles dans ce domaine soulève des interrogations légitimes sur la capacité ou la volonté réelle des autorités à mener à bien le processus de refondation constitutionnelle promis aux Gabonais.

La campagne référendaire : entre prosélytisme effréné et déjà-vu inquiétant

Le général Oligui Nguema, dans une posture pour le moins ambivalente de juge et partie, parcourt frénétiquement le pays pour promouvoir le « oui » au référendum. Cette démarche, qui évoque de manière troublante les pratiques du régime déchu, soulève de sérieuses interrogations sur l’utilisation potentiellement abusive des ressources publiques à des fins de propagande politique. Les Gabonais, quant à eux, restent dans une attente anxieuse, ignorant toujours le contenu précis de la nouvelle constitution proposée. Cette situation ubuesque, où l’on demande au peuple d’approuver un texte qu’il n’a pas pu lire, suscite un malaise grandissant et remet en question la légitimité même du processus référendaire.

Les défis d’un scrutin transparent et crédible 

La fiabilité de la liste électorale et la mise en place de mécanismes garantissant l’intégrité du vote demeurent des enjeux cruciaux pour la crédibilité du référendum. Les autorités de transition font face à un défi de taille : prouver leur capacité à organiser un scrutin irréprochable, exempt des irrégularités qui ont entaché les élections passées. La crédibilité du référendum, et par extension celle de tout le processus de transition, repose sur la capacité du pouvoir à transcender les errements du passé et à instaurer une nouvelle culture politique basée sur la transparence et l’intégrité.

Vers un dénouement anticipé de la transition 

Les récentes déclarations du général Oligui Nguema évoquant un possible raccourcissement de la période de transition ont jeté un pavé dans la mare politique gabonaise. Cette velléité d’accélération du processus soulève de nombreuses questions sur la pérennité et la profondeur des réformes envisagées. Si une transition plus courte pourrait répondre aux aspirations de changement rapide d’une partie de la population, elle risque également de compromettre la qualité et l’exhaustivité des réformes nécessaires pour refonder durablement les institutions gabonaises.

Un tournant historique pour le Gabon

Le référendum constitutionnel s’annonce donc comme un moment décisif pour l’avenir politique du Gabon. Il incombe aux autorités de transition de garantir un processus transparent, inclusif et véritablement démocratique, seul à même de conférer une légitimité incontestable à la future loi fondamentale du pays. La publication rapide et une large diffusion du projet de constitution apparaissent comme des impératifs catégoriques pour permettre un débat éclairé et une décision informée des citoyens. Dans ce contexte effervescent et incertain, le peuple gabonais se trouve face à un choix cornélien : entériner une nouvelle ère constitutionnelle dont les contours restent flous, ou rejeter un processus perçu comme opaque et potentiellement biaisé. L’issue de ce scrutin déterminera non seulement l’architecture institutionnelle du Gabon, mais aussi sa trajectoire démocratique pour les décennies à venir. Le pays se trouve à la croisée des chemins, entre l’espoir d’un renouveau démocratique authentique et la crainte d’une reproduction des schémas autoritaires du passé.

 

Anne-Marie DWORACZEK-BENDOME
22/07/2024

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