Dans un contexte plus que tendu autour de la cybersécurité et d’éventuels actes de sabotages de Moscou, l’Allemagne s’apprête à limoger son chef de la cybersécurité pour des liens présumés avec la Russie.

A priori, ce n’est pas le moment de se séparer de son patron de la cybersécurité. Pourtant, Arne Schönbohm, président de l’agence fédérale allemande BSI, responsable de prévenir et contrer les cyberattaques outre-Rhin, vit peut-être ses dernières heures à son poste. La raison ? Des contacts présumés avec le renseignement russe.

«Un changement au poste de président du BSI va intervenir rapidement», ont assuré des sources proches du gouvernement à l’AFP. Interrogée sur la question, la ministre de l’Intérieur a botté en touche. «A ce stade, je ne peux vous dire qu’il s’agit de reproches que nous prenons au sérieux», a affirmé Nancy Faeser, avant d’ajouter : «Nous allons d’abord les examiner et ensuite mettre en œuvre les mesures nécessaires.»

Un ancien collaborateur du KGB

Le problème provient des liens qu’entretient Arne Schönbohm avec l’association Cyber-Sicherheitsrat Deutschland (Conseil allemand de cybersécurité ou CSRD). Il aurait toujours des contacts présumés avec cet organisme qu’il a cofondé en 2012. Aujourd’hui, le CSRD conseille les entreprises, agences gouvernementales et responsables politiques sur les questions de cybersécurité. Parmi ses adhérents, c’est la société Protelion qui interroge. Protelion est une filiale d’une entreprise de cybersécurité russe appelée O.A.O. Infotechs. Elle a été fondée par un ancien collaborateur des services de renseignements russes KGB, selon les informations du réseau de recherche «Policy Network Analytics».

Le CSRD s’est défendu, qualifiant les accusations d’influence russe «d’absurdes». Dans la foulée, le président de l’association, Hans-Wilhelm Dünn, a annoncé avoir exclu «avec effet immédiat» Protelion de ses membres adhérents. Il a également assuré n’avoir jamais mené de projets communs avec la société depuis son adhésion en juin 2020.

L’affaire fait grand bruit au sein du gouvernement. Alors qu’Arne Schönbohm et la ministre Nancy Faeser devaient effectuer une présentation du rapport annuel du BSI, le ministère de l’Intérieur l’a annulée. «Il est clair que nous ne pouvons pas maintenir ce rendez-vous avant que la situation ne soit complètement clarifiée», a justifié la porte-parole du ministère.

Un sabotage en Allemagne ce week-end

Ces soupçons, révélés par des médias allemands ces derniers jours, interviennent alors que le pays est sur le qui-vive face à d’éventuels actes de sabotage de Moscou. Samedi 8 octobre, l’Allemagne a subi un sabotage ferroviaire, certains évoquant la piste russe dans le contexte de la guerre en Ukraine. Il avait paralysé le trafic pendant trois heures dans le nord du pays. Des milliers de voyageurs qui souhaitaient emprunter les liaisons à grande vitesse et régionales étaient restés bloqués dans les gares. Derrière cette panne, des câbles de communication stratégiques avaient été sectionnés.

Avant la guerre en Ukraine, Moscou avait déjà été accusé à plusieurs reprises de cyberespionnage contre Berlin. Dans ce contexte, l’opposition conservatrice allemande a appelé à repenser l’architecture de sécurité du pays et plus largement, de l’Union européenne. «L’époque moderne marquée par la conduite de guerres hybrides exige que nous adaptions nos concepts», a affirmé Throsten Frei, un des responsables du parti de l’ex-chancelière Angela Merkel.

RSA et AFP



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