Le président de la plateforme EPG a alerté lors d’une conférence de presse le 18 décembre sur les atteintes à l’État de droit, la privation des libertés et les menaces pesant sur la justice au Gabon.
Par Anne Anne Marie DWORACZEK-BENDOME
Discours sur l’État de droit, la démocratie et les réformes électorales au Gabon
Dans une allocution marquante, le président de la plateforme Ensemble pour le Gabon (EPG), Alain Claude Bilié Bi Nzé, ancien 1ᵉʳ ministre, a abordé, avec clarté et profondeur, des questions cruciales pour l’avenir de la nation : l’État de droit, les libertés fondamentales et les réformes électorales. Ce discours, riche en analyses et propositions, met en lumière les défis actuels et les solutions envisagées pour construire un Gabon plus juste et démocratique. Retour sur les points saillants de cette prise de position.
L’État de droit : le pilier de la démocratie en danger
Au centre du discours, le président de l’EPG a réitéré l’importance fondamentale de l’État de droit, socle indispensable pour garantir les libertés individuelles. Il a souligné que ce principe ne saurait être subordonné à des intérêts partisans, car il transcende les clivages politiques. Pourtant, la situation actuelle suscite de vives inquiétudes. La concentration excessive des pouvoirs entre les mains d’un seul homme, couplée à une interérence accrue de l’exécutif dans le système judiciaire, met gravement en péril les droits primordiaux des citoyens.
L’imposition récurrente de couvre-feux sans cadre juridique clair constitue un exemple emblématique de ces dérives. Ces mesures arbitraires, prolongées sur plus d’un an, ont restreint les libertés de mouvement, asphyxié les activités économiques et piétiné la dignité des populations. Ce constat, alarmant, appelle à une mobilisation collective pour mettre fin à ces pratiques liberticides et engager des réparations pour les victimes. Le respect des droits humains n’est pas une option : il est l’essence même d’une gouvernance juste.
Par ailleurs, la liberté d’expression, pilier d’une démocratie vivante, est mise à rude épreuve. Ceux qui critiquaient hier le régime en place sont aujourd’hui persécutés pour avoir émis des opinions similaires envers le pouvoir actuel. Cette justice à géométrie variable est inacceptable. Le président a ainsi appelé à une égalité devant la loi, afin que tous les citoyens, quelle que soit leur position, soient traités avec équité.
Une gouvernance économique défaillante aux conséquences lourdes
Le président de l’EPG a ensuite porté un regard critique sur la gestion économique du pays, jugée chaotique et inefficace. Le taux d’endettement, dépassant largement les seuils acceptables, reflète une gestion irresponsable des finances publiques. Les ressources, au lieu d’être investies de manière productive, sont dilapidées dans des projets sans impact réel sur le développement économique et social.
Cette situation a des conséquences dramatiques sur la vie quotidienne des Gabonais. Les jeunes, souvent bien formés, sont laissés-pour-compte face à un marché de l’emploi paralysé. La stratégie consistant à recruter massivement dans l’armée ne peut être qu’un palliatif temporaire, masquant les problèmes structurels sans y apporter de réelles solutions.
De plus, les fonds promis pour le développement provincial semblent avoir disparu. Les projets censés dynamiser les économies locales n’ont pas vu le jour, laissant les populations dans un désarroi croissant. Parallèlement, les étudiants gabonais à l’étranger continuent d’être expulsés faute de bourses payées à temps. Cette gestion calamiteuse des ressources exige des réponses claires et des mesures correctives immédiates.
Des réformes électorales vitales pour l’avenir
Dans ce contexte troublé, la nécessité de réformes électorales s’impose avec évidence. Le président de l’EPG a exposé un plan ambitieux et structurant, articulé autour de sept axes majeurs :
- Refonte du fichier électoral : L’actualisation complète et transparente du fichier électoral est une priorité absolue. Une supervision par une entité indépendante garantirait la fiabilité des inscriptions et limiterait les fraudes.
- Création d’une Commission électorale indépendante : Le ministère de l’Intérieur a montré ses limites dans l’organisation de scrutins crédibles. Une commission neutre et compétente serait à même d’assurer l’intégrité du processus électoral.
- Nouveau découpage électoral : Le découpage actuel est injuste, favorisant certaines régions au détriment d’autres. Une révision équilibrée est indispensable pour refléter fidèlement la répartition démographique du pays.
- Sécurisation du vote : L’introduction d’urnes transparentes et scellées, la publication des résultats bureau par bureau et l’utilisation d’un bulletin unique sont autant de mesures essentielles pour garantir des élections fiables.
- Calendrier électoral prévisible : La transparence passe par une planification claire des scrutins, permettant aux acteurs de se préparer efficacement.
- Neutralité de l’armée : L’armée doit se limiter à un rôle logistique et rester en dehors des enjeux politiques pour ne pas biaiser le processus électoral.
- Plafonnement des dépenses de campagne : Ce mécanisme permettrait de rétablir une compétition équitable et d’éviter des dérives liées à l’argent.
La transition comme tremplin vers la refondation
Le président de l’EPG a insisté sur la nécessité de profiter de la transition actuelle pour repenser en profondeur les institutions du pays. Organiser des élections sans réformes préalables reviendrait à pérenniser les dysfonctionnements existants. Ainsi, il a appelé à une restructuration des collectivités locales, du Parlement et de la Cour constitutionnelle afin de restaurer la confiance dans les institutions.
Il a également averti contre toute tentative de manipulation du processus électoral pour servir des intérêts partisans. Selon lui, seul un cadre institutionnel transparent et légitime permettra au peuple gabonais de choisir librement ses dirigeants.
Un appel à l’action citoyenne
Pour clore son intervention, le président de l’EPG a lancé un appel vibrant à la mobilisation collective. Il a exhorté les Gabonais à s’unir pour défendre leurs droits, exiger des réformes électorales justes et construire ensemble un avenir meilleur. Ce combat, loin d’être l’apanage d’une élite politique, concerne chaque citoyen, car il en va de l’avenir de la nation.
Face aux défis actuels, l’heure est venue de faire preuve de courage et de détermination pour relever les obstacles. Ensemble, le Gabon peut devenir une nation où justice, liberté et prospérité ne sont pas de simples idéaux, mais des réalités accessibles à tous.