À un mois des élections générales (présidentielles, législatives et locales) prévues le 26 août 2023 au Gabon, la tension est palpable. Le processus électoral débute dans un climat de méfiance entre le pouvoir du président Ali Bongo, candidat à un troisième mandat controversé, et une opposition mobilisée, mais fragmentée.

La révision constitutionnelle d’avril 2023, approuvée par le Parlement et le Sénat gabonais, a éliminé la limitation de deux mandats présidentiels, suscitant la colère de l’opposition. Selon le rapport de la mission d’observation électorale internationale présenté le 5 juillet, « cette réforme soulève des problèmes de légitimité démocratique ».

Un autre point de tension concerne la composition du Centre gabonais des élections (CGE), l’organisme chargé d’organiser le scrutin, perçu par l’opposition comme acquis au pouvoir en place. En effet, le CGE est dirigé par Michel Stéphane Bonda, ancien ministre délégué aux Eaux et Forêts d’Ali Bongo Ondimba.

Le fichier électoral suscite également des inquiétudes. Malgré les assurances du ministère de l’Intérieur, des doutes subsistent quant à sa transparence. Selon Jean-Pierre Nzoghé, leader de la Dynamique unitaire, principale coalition de l’opposition, « des vérifications indépendantes sont nécessaires pour éviter tout soupçon de fraude ». Lors du lancement de la révision de la liste électorale le 6 juillet, le ministre de l’Intérieur, Noël Lambert Matha, a déclaré avoir enregistré 1 255 662 inscriptions, dont 43 971 nouveaux électeurs, représentant près de 20 % du total. Il a ajouté que « les 80 % restants sont des Gabonaises et des Gabonais déjà inscrits, mais qui se sont réinscrits plusieurs fois ». Pour apaiser les préoccupations des acteurs politiques et de la société civile, le ministre de l’Intérieur a affirmé que le fichier serait accessible à tous les observateurs accrédités, conformément au calendrier rendu public.

Ce climat de défiance révèle une lassitude grandissante de la population gabonaise envers le régime Bongo au pouvoir depuis 1968. Selon un sondage Afrobarometer de mars 2023, 78 % des Gabonais se disent insatisfaits de la démocratie dans leur pays.

Processus électoral désordonné

Une procédure électorale chaotique fait référence à un processus électoral mal organisé ou manquant de transparence. Cela peut englober des problèmes tels que des listes électorales incorrectes, une mauvaise gestion des bureaux de vote, des irrégularités lors du dépouillement des votes, des fraudes électorales, une supervision inadéquate des élections, et plus encore. Une procédure électorale désordonnée a de graves conséquences sur la légitimité des résultats des élections et sur la confiance du public dans le processus démocratique, sans oublier les blessés, les décès et les destructions de biens qui peuvent en découler. Cela peut également entraîner des contestations électorales, des tensions politiques et des troubles sociaux. Au Gabon, les élections de 1993, 1998, 2005, 2009 et 2016 ont connu les répercussions mentionnées précédemment. Jusqu’à ce jour, les victimes ou leurs ayants droit attendent toujours des réparations et des condamnations de la part de la justice.

Élections : le passé du Gabon

Depuis 1990, date de l’avènement de la démocratie au Gabon, le pays a organisé plusieurs élections présidentielles, législatives et locales. Voici un aperçu des principales élections qui ont eu lieu :
Élections présidentielles :

1993 : Élection présidentielle remportée par Omar Bongo Ondimba.

1998 : Réélection d’Omar Bongo Ondimba.

2005 : Réélection d’Omar Bongo Ondimba.

2009 : Élection présidentielle remportée par Ali Bongo Ondimba.

2016 : Réélection d’Ali Bongo Ondimba.

Élections législatives :

1996 : Élections législatives.

2001 : Élections législatives.

2006 : Élections législatives.

2011 : Élections législatives.

2018 : Élections législatives.

Élections locales :

1997 : Élections locales.

2002 : Élections locales.

2006 : Élections locales.

2013 : Élections locales.

2018 : Élections locales.

Selon le dernier sondage Afrobarometer publié en avril 2023, 71% des Gabonais jugent le processus électoral « pas du tout libre et équitable« .

L’opposition entend surfer sur ce « ras-le-bol démocratique » lors de la campagne, et espère créer la surprise malgré ses divisions internes. Son objectif ultime est de réaliser la première alternance démocratique de l’histoire du Gabon. Cependant, dans le contexte actuel des élections en cours, l’espoir d’avoir des élections libres, transparentes et équitables pour toutes les parties impliquées reste un vœu pieux sans perspective immédiate de réalisation.

Rédaction DBNEWS
12/07/2023