Mahamadou Bonkoungou - Burkina Faso/Président-Directeur Général du Groupe EBOMAF
Mahamadou Bonkoungou - Burkina Faso/Président-Directeur Général du Groupe EBOMAF

L’omniprésence du groupe burkinabè EBOMAF dans l’économie depuis l’avènement du président de la Transition, Brice Clotaire Oligui Nguema, soulève des questions sur la souveraineté économique du pays et la place des entreprises nationales dans la vision du « Gabon nouveau ».

Par Anne-Marie Dworaczek-Bendome | Publié le 17 août 2024

Mahamadou Bonkoungou - Burkina Faso/Président-Directeur Général du Groupe EBOMAF
Mahamadou Bonkoungou – Burkina Faso/Président-Directeur Général du Groupe EBOMAF

Un nouveau mastodonte économique aux multiples tentacules

Indubitablement, le groupe EBOMAF, dirigé par l’homme d’affaires burkinabè Mahamadou Bonkoungou, s’est imposé comme un acteur incontournable de l’économie gabonaise. Son ascension fulgurante, comparable à celle d’un météore traversant le ciel économique gabonais, ne cesse d’éblouir – ou d’aveugler – selon les points de vue.

Astucieusement, EBOMAF a diversifié ses activités, tissant une toile d’araignée complexe dans le paysage économique du pays qui oscille entre le flou et l’improvisation permanente, ce qui n’est guère mieux que l’ancien régime  :

  • Dans le secteur des infrastructures, EBOMAF s’est vu confier des contrats pharaoniques. Notamment, un projet de construction routière évalué à plus de 1000 milliards de francs CFA pour une route 2×2 voies, faisant d’EBOMAF le maître d’œuvre d’une artère vitale pour le développement du pays.
  • Audacieusement, le groupe a mis un pied dans le secteur maritime en mettant à disposition son navire et en acquérant presque la compagnie nationale de navigation maritime. Cette manœuvre stratégique positionne EBOMAF comme un acteur clé du désenclavement maritime du Gabon.
  • Étonnamment, EBOMAF a également décroché un contrat de 700 milliards de francs CFA dans le secteur agricole, pour la fourniture d’engins. Cette diversification inattendue soulève des questions sur la capacité des entreprises locales à répondre aux besoins du pays.
  • Curieusement, le groupe s’est même aventuré dans le secteur de la pêche, obtenant un contrat pour l’exploitation du thon sous l’ancien régime. Cette incursion dans un domaine a priori éloigné de son cœur de métier témoigne de l’appétit vorace d’EBOMAF pour les opportunités économiques au Gabon.

EBOMAF au Gabon : Une présence qui soulève des interrogations

Inévitablement, l’omniprésence d’EBOMAF dans l’économie gabonaise soulève des questions sur la vision économique du nouveau régime. Alors que le « Gabon nouveau » était censé promouvoir une plus grande participation des entreprises nationales, force est de constater que les grands contrats continuent d’échapper aux acteurs locaux.

Judicieusement, il convient de s’interroger : cette situation ne risque-t-elle pas de créer une dépendance économique malsaine envers un seul groupe étranger ? La concentration de tant de pouvoir économique entre les mains d’EBOMAF ne constitue-t-elle pas un risque pour la souveraineté économique du Gabon ?

Comme un écho du passé ?

Ironiquement, cette situation n’est pas sans rappeler le cas d’Olam sous le régime d’Ali Bongo. À l’époque, cette entreprise étrangère avait bénéficié d’un traitement de faveur, devenant progressivement un acteur dominant de l’économie gabonaise, au détriment des entreprises locales.

Malheureusement, il semble que l’histoire se répète. Le nouveau régime, malgré ses promesses de changement, semble reproduire les schémas du passé, privilégiant un acteur étranger au détriment du développement d’un tissu économique local fort.

Un équilibre délicat à trouver

Indéniablement, le Gabon se trouve à un carrefour crucial de son développement économique. Si l’apport d’EBOMAF en termes d’investissements et d’expertise est indéniable, il est légitime de s’interroger sur les conséquences à long terme de cette dépendance.

Le défi pour le nouveau régime sera de trouver un équilibre subtil entre l’attraction d’investisseurs étrangers et le développement d’un écosystème économique local robuste. Sans cela, le « Gabon nouveau » risque de n’être qu’une façade, masquant une réalité économique peu différente de celle du régime précédent.

L’avenir dira si le Gabon saura naviguer dans ces eaux économiques troubles, en évitant les écueils de la dépendance et en traçant une voie vers une véritable autonomie économique. Le cas EBOMAF pourrait bien être le baromètre de cette capacité à concilier ouverture économique et souveraineté nationale.

DBnews

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