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Opération de salubrité publique ou règlements de comptes ?

Véritable crash social que celui qui voit passer Brice Laccruche Alihanga du Capitole à la roche tarpéienne !  Après avoir perdu son tout-puissant poste de Directeur de cabinet  du président Ali Bongo, lequel lui conférait, du reste, rang de ministre, le Franco-Gabonais a été interpellé le 3 décembre dernier, à son domicile à Libreville au Gabon. La raison : son nom est cité dans une sombre affaire de détournement de fonds publics. D’autres personnalités, à l’instar du désormais ex-ministre du Pétrole, Noël Mboumba, ainsi que du désormais ex-ministre de l’Eau et de l’Energie, Tony Ondo Mba, ont été également épinglés et aussitôt congédiées du gouvernement, certains ayant même été écroués. Il faut dire que cette vague d’arrestations s’inscrit dans le cadre d’une vaste opération anti-corruption lancée récemment contre l’entourage du président gabonais, qui a permis de mettre au frais une dizaine de personnalités proches du numéro un gabonais.  Opération de salubrité publique ou règlements de comptes ?  Si la chute de ces pontes du régime, trouve son explication dans la délinquance financière à eux reprochée, on peut toutefois se demander si certains d’entre eux ne payent pas plutôt pour leur crime de lèse-majesté et pour ainsi dire, leur manque de loyauté envers l’illustre malade gabonais.  On sait, par exemple, que Brice Laccruche Alihanga avait considérablement irrité en haut lieu, en menant, en l’absence de Ali Bongo convalescent après un accident vasculaire cérébral (AVC), une tonitruante « tournée républicaine » anti-système dans tout le pays.  Une haute trahison s’il en fut, qui est certainement restée en travers de la gorge du Zeus gabonais.  Humainement, on peut comprendre que ce dernier ait été profondément meurtri que des amis ou supposés tels, aient voulu l’enterrer… vivant, et donc avant l’heure.

 

L’exemple doit commencer par venir d’en haut

 

Cela dit, règlements de comptes ou pas, les mis en cause dans ce vaste scandale financier, ne doivent s’en prendre qu’à eux-mêmes.  Quand on accuse le Grand Manitou de tous les péchés du… Gabon, encore faut-il être soi-même sans reproche.  En tous les cas, il faut se féliciter de cette ambitieuse croisade et souhaiter surtout qu’elle ne soit pas à géométrie variable.  Il faudra, en effet, éviter de donner le sentiment aux uns, qu’ils ne seront jamais inquiétés tant qu’ils resteront dociles, obséquieux et dans les bonnes grâces du président, et aux autres qu’ils doivent leur brusque et brutale descente aux enfers à leur sens de la critique et leur impertinente et courageuse remise en cause de l’ordre séculaire établi.  Pour la crédibilité de l’opération, force doit rester à la loi pour tout le monde, quels que soient les rapports du mis en cause avec le Grand chef. Autrement, cette croisade anti-corruption s’apparentera à de la poudre aux yeux, juste destinée à détourner les Gabonais de leurs vrais problèmes, notamment leur quasi impossible accès à la démocratie et à l’alternance, qui prend des allures de fatalité. Dieu seul sait si, en matière de démocratie, le Gabon, comme bon nombre de ses voisins, fait figure de cancre invétéré. Tout cela, hélas, du fait d’un malsain et incestueux rapport au pouvoir de la dynastie Bongo, aux affaires depuis bientôt  six décennies. Engager une vaste campagne d’assainissement et de moralisation de la vie publique, c’est bien. Mais quand les Bongo, du père au fils, sont cités dans la fameuse affaire des « biens mal acquis», il y a de quoi rester songeur. C’est dire si l’exemple doit commencer par venir d’en haut.

 

Cheick Beldh’or SIGUE