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L’ONG Invisible Children sera-t-elle entendue ?

C’est un rapport qui fait froid dans le dos. En effet, dans son dernier rapport, l’ONG Invisible Children dénonce plus de 300 attaques contre des civils dans l’Est de la Centrafrique et dans le Nord-Est de la République démocratique du Congo (RDC). 72 civils auraient été tués et 265 autres enlevés entre janvier et septembre 2019. Et ce n’est pas tout : 4500 civils auraient été aussi kidnappés avec à la clé, l’enrôlement forcé d’enfants comme soldats. Ces crimes auraient été commis pendant ces dix dernières années par plusieurs groupes armés dont les hommes de l’Armée de résistance du Seigneur, la LRA de Joseph Kony, très actifs dans le Haut et le Bas-Uélé de la RDC. Du côté centrafricain, les criminels ont pour noms Anti-balaka et  Séléka dont les cibles privilégiées seraient les femmes et les enfants. Le hic est que tout cela se déroule au nez et à la barbe des autorités des deux pays, sans qu’aucune action forte ne soit menée contre ces fous de la violence. Pouvait-il en être autrement quand on sait que l’Etat est quasi absent dans certaines parties des territoires de ces deux pays? La nature a horreur du vide, dit-on, et l’on ne saurait être surpris que les territoires abandonnés par des Etats, ne soient occupés par des assassins, des kidnappeurs et autres prédateurs. En vérité, les vrais maîtres des zones dont les populations ont souffert et continuent de souffrir le martyre, ne sont autres que les groupes armés qui les ont mises sous coupe réglée. La question que l’on pourrait se poser, est celle de savoir comment faire entrer ces djinns de la violence dans leur bouteille. En tout cas, en dépit d’un accord de paix signé entre l’autorité et les groupes armés en RCA et de promesses fermes faites par les autorités congolaises de mettre fin aux supplices des citoyens de Haut et de Bas Uélé, force est de reconnaître que les démons de la violence ne se sont pas encore assoupis.

 

Tshisekedi et Touadéra gagneraient à engager des actions fortes contre les marchands de la mort

 

Et sans jouer les Cassandre, la situation risque d’être pire pour les groupes ciblés, étant donné que le nombre de crimes va crescendo et que la communauté internationale reste aphone et atone face à cette tragédie humaine. L’ONG Invisible Children qui l’invite à changer son fusil d’épaule, sera-t-elle d’ailleurs entendue ? Rien n’est moins sûr. Tout laisse croire que ce rapport accablant de l’ONG, coulera comme de l’eau sur les plumes d’un canard. En tout cas, pour autant qu’il puisse émouvoir certains citoyens, il n’empêchera pas les groupes armés de s’adonner  à leur sport favori qui est de tuer, violer, kidnapper et enrôler des enfants dont ils se servent comme de machines à tuer. Cela dit, il faut saluer à sa juste valeur le travail abattu par l’ONG car, même si ce rapport ne mettra pas fin au cauchemar des femmes et des enfants des deux pays, il aura au moins le mérite d’attirer l’attention des gouvernants et de la communauté internationale sur des crimes qui révulsent la conscience humaine. Du reste, les présidents Félix Tshisekedi et Faustin-Archange Touadéra se doivent, au vu du contenu de ce rapport, de prendre toute la mesure du péril. Cela est d’autant nécessaire qu’il traduit l’échec des politiques sécuritaires de leurs pays respectifs et ces chefs d’Etat  gagneraient à engager des actions fortes contre ces marchands de la mort. Et plus tôt ils le feront, mieux cela vaudra. Car, il y va de la stabilité, de la prospérité et de la cohésion sociale dans les deux pays. La sécurité, dit-on, est l’alpha et l’oméga du succès de tout projet. Et il est difficilement compréhensible que les populations de ces deux pays continuent de broyer du noir, pendant que sous-sol regorge de richesses insultantes. C’est dire si c’est la gouvernance même qui est à revoir.

Dabadi ZOUMBARA