Nouveaux critères d’obtention de bourse: L’avis favorable d’un expert (Tribune libre)

En rapport avec la controverse née des nouvelles mesures relatives à l’attribution des bourses universitaires, nous avons reçu l’avis d’un spécialiste du monde de l’éducation, ayant requis l’anonymat et qui, lui, est favorable aux critères d’âge et de moyenne récemment adoptés par le gouvernement. Lecture.

 

Le débat actuel portant sur les nouveaux critères d’octroi de bourses aux élèves après le baccalauréat met en exergue deux conceptions distinctes. Une conception relevant de la considération strictement pédagogique et intellectuelle de l’éducation; et une autre beaucoup plus sociologique, en vertu de laquelle l’école est une institution faisant partie d’une sorte d’écosystème social qui en conditionne consubstantiellement le vécu, les échecs et les réussites des principaux acteurs que sont les formateurs et les apprenants. Ces deux perceptions, aussi diamétralement opposées qu’elles puissent paraître, sont en réalité complémentaires et donc loin d’être irréconciliables.

Ma modeste expérience du système éducatif gabonais, forgée au bout de près de 30 ans d’exercice, d’abord comme simple enseignant puis en tant que dirigeant d’établissement secondaire et inspecteur pédagogique, m’a clairement montré que la vocation à la fois socialisante et sociale de l’école trouve sa satisfaction optimale dans les effets méritoires que constituent l’excellence des résultats scolaires ou académiques d’un élève ou d’un étudiant d’une part, et leur sincérité éprouvée et attestée dans le  cadre concurrentiel de la compétition des intelligences d’autre part. Vu sous cet angle, le vif débat que connaît actuellement notre pays, au sujet des critères d’âge (19 ans) et de la moyenne minimale de 12/20 pour l’obtention d’une bourse d’étude, s’apparente davantage à un énorme malentendu entre les gouvernants et ceux qui s’opposent à cette évolution, dont il faut par ailleurs chercher à comprendre tous les tenants et aboutissants pour que prévale un minimum de sérénité. L’exemple du Prytanée militaire de Libreville, dont les performances sont saluées par tous et les conditions d’accès extrêmement rigoureuses et socialement démocratiques non contestées par personne, conditions basées sur un âge sélectif et l’obtention par les candidats d’une moyenne de 12/20 au moins, démontre combien le mérite n’est ni antagonique ni antinomique de l’origine sociale des enfants concernés.

Issues des concertations passées, en l’occurrence les états généraux de l’éducation de 2010 et la dernière task force sur le diagnostic désastreux de notre système éducatif, les dernières décisions liées à la bourse d’État font partie de tout une batterie de résolutions ayant trop souvent été renvoyées aux calendes grecques, notamment en raison d’un certain manque de courage de la part des pouvoirs publics. Les résultats catastrophiques, année après année, enregistrés lors des différents examens et concours officiels au Gabon, indiquent bien l’urgence à agir dans le sens de redresser la barque, au risque, sinon, de laisser s’instaurer définitivement une culture dangereuse de la médiocrité que les générations montantes ne sauraient in fine pardonner à celles actuellement aux manettes de notre communauté de destins.

Toutefois, pour que les progrès recherchés soient revêtus de toute la légitimité nécessaire à l’adhésion populaire dont ils ont besoin pour se concrétiser, la culture de l’excellence dont se prévaut désormais le gouvernement, pour permettre à l’école gabonaise d’être le moteur de développement qu’elle est censée constituer, doit scrupuleusement prendre en compte un panel plus large de points d’achoppement à résoudre et non se circonscrire aux seuls aspects pédagogiques inhérents au cumul des connaissances ou leur usage par les jeunes gabonais. Des voies de compensation claires et pérennes, tout comme des outils efficaces de maintien du lien et de l’ascenseur sociaux,  doivent être proposés à tous ces jeunes en proie à des difficultés diverses et susceptibles de freiner les talents. L’environnement global et le contexte général d’apprentissage doivent aussi faire l’objet de cette nouvelle culture de l’excellence tant souhaitée par l’exécutif. Le tout, afin que règnent véritablement le mérite et le génie gabonais dans toutes les strates de notre société, en particulier dans les sphères de décision les plus exigeantes.

 

J. Y. G, spécialiste des questions de l’éducation

Avec Investir Gabon

 

 

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