Fespaco : pétition contre la série "Le Trône" après une agression contre une femmeNadège Beausson Diagne (g), Azata Soro et la militante et cinéaste camerounaise Pascale Obolo au Fespaco à Ouagadougou le 28 février 2019.

 

Une pétition a été mise en ligne jeudi soir contre la série « Le Trône », en compétition au Fespaco de Ouagadougou, et dont le réalisateur a été condamné par la justice pour avoir agressé et défiguré une de ses assistantes sur le tournage.

Lancée par les collectifs de femmes « Cinéastes non-alignées » et « Noire n’est pas mon métier », la pétition intitulée « Détrôner le Trône » appelle à ce que la série télévisée, réalisée par le cinéaste burkinabè Tahirou Tasséré Ouedraogo, soit « exclue de la compétition » du 26e Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (Fespaco).

« Pour des raisons éthiques, il est inadmissible que ce film ait été sélectionné par le Fespaco dans le cadre du cinquantenaire du festival« , écrivent les auteures de la pétition.

Elle appellent « la direction du Festival et l’ensemble de la profession » à marquer « par un geste fort et solidaire le soutien contre les violences, le harcèlement et les abus sexuels subis par les femmes dans l’industrie du cinéma africain ».

Comédienne et réalisatrice burkinabè de 32 ans, Azata Soro a témoigné au Fespaco sur son agression en 2017, lors du tournage de la série, par M. Ouedraogo (frère du grand cinéaste Idrissa Ouedraogo décédé l’an dernier), qui lui a lacéré le visage avec un tesson de bouteille. Elle reste aujourd’hui avec le visage balafré.

 

#Memepaspeur

Inspirées par le mouvement #MeToo, Mme Soro et l’actrice française Nadège Beausson-Diagne ont témoigné devant les médias sur le harcèlement sexuel et les agressions dont elles ont été victimes lors de productions africaines.

Sur le modèle de #MeToo et #Balancetonporc, un nouveau mouvement a été lancé, #Memepaspeur, pour « libérer la parole des femmes » en Afrique, selon Nadège Beausson-Diagne, populaire pour ses rôles dans la série « Plus belle la vie » et le film « Bienvenue chez les Ch’tis« .

Le directeur d’Orange Studio David Kessler a expliqué vendredi à l’AFP avoir « coproduit » la série « Le Trône », « bien avant que l’incident (de l’agression d’Azata Soro) n’éclate », et avoir ensuite « été mis au courant tardivement de l’incident« .

Après le procès, « nous avons demandé au réalisateur (Tassirou Ouedraogo) d’appliquer le jugement dans tous ses aspects et d’indemniser la victime ». « Sinon on ne pourra plus jamais travailler avec lui », a indiqué M. Kessler, précisant qu’Orange Studio n’est pas prêt à produire la saison 2 que veut tourner le réalisateur.

Au procès, M. Ouedraogo avait reconnu les faits, demandé pardon et été condamné à une peine de prison avec sursis et à des dommages et intérêts, selon un journaliste de l’AFP présent à l’audience. Il n’a jamais versé de dommages et intérêts à Mme Soro, selon elle.

 

Alerte 

La directrice adjointe des programmes de TV5 Monde Marjorie Vella a indiqué à l’AFP que la chaîne internationale francophone, qui avait préacheté la série « Le Trône », ne la diffuserait pas.

« On a préacheté le projet bien avant l’incident ». « La cause des femmes est très chère à TV5 Monde ». « Je ne pense pas qu’on va la diffuser, du moins dans l’immédiat, tant que le jugement n’aura pas été appliqué », a déclaré Mme Vella, en référence au paiement des dommages et intérêts qui permettrait à Mme Soro de faire une chirurgie esthétique réparatrice.

Interrogé sur la polémique de la sélection en compétition de « Trône », une source dans l’organisation du Fespaco, qui a requis l’anonymat, a expliqué : « On a sélectionné l’oeuvre ». Elle a cependant ajouté espérer que cette affaire serve « d’alerte », et qu’à l’avenir l’éthique soit prise en compte dans la sélection.

Contacté à de nombreuses reprises par l’AFP, le délégué général du Fespaco Ardiouma Soma est resté injoignable.

La polémique enfle depuis le début du festival sur la place des femmes dans le cinéma africain, aucune femme n’ayant reçu l’Etalon d’Or de Yennenga en 50 ans de festival, et des témoignages commençant à émerger sur les abus sexuels dont elles sont victimes dans le milieu.

Prévue jeudi après-midi, la cérémonie de remise des prix du Fespaco pour les séries télé a été reportée à samedi, sans explication.

Avec VOA Afrique

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