Denis Mukwege et Nadia Murad, prix Nobel de la paix 2018.

Hérauts de la lutte contre les violences sexuelles, le Congolais Denis Mukwege et la Yazidie Nadia Murad, lui médecin et elle ex-esclave des jihadistes, recevront lundi un Nobel de la paix qui braque la lumière sur ces « crimes de guerre ».

Le gynécologue de 63 ans et la jeune Irakienne de 25 ans sont attendus à Oslo pour se voir remettre le Nobel qui leur a été attribué début octobre par le comité Nobel norvégien « pour leurs efforts en vue de mettre fin à l’emploi des violences sexuelles en tant qu’arme de guerre ».

Il leur sera remis lors d’une cérémonie débutant à 13H00 (12H00 GMT) à l’Hôtel de ville d’Oslo. Les Nobel des autres disciplines le seront le même jour à Stockholm, sauf celui de Littérature, reporté à 2019 à cause – paradoxalement – d’un scandale de viol ayant secoué l’Académie suédoise.

« Denis Mukwege est le sauveur qui a consacré sa vie à la défense de ces victimes. Nadia Murad est le témoin qui raconte les abus perpétrés contre elle-même et les autres », avait déclaré la présidente du comité Nobel, Berit Reiss-Andersen, lors de l’annonce le 5 octobre.

« Chacun à sa manière, ils ont contribué à donner une plus grande visibilité aux violences sexuelles commises en temps de guerre afin que leurs auteurs puissent répondre de leurs actes », avait-elle expliqué.

– ‘Armes de destruction massive’ –

Incarnant tous deux la lutte contre un fléau planétaire qui dépasse le seul cadre des conflits comme l’illustre le mouvement #MeToo, les deux colauréats ont dédié le Nobel aux centaines de milliers de femmes victimes de violences sexuelles.

Surnommé « l’homme qui répare les femmes » – titre d’un documentaire qui lui a été consacré -, Denis Mukwege a fondé l’hôpital de Panzi en 1999 à Bukavu, dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC).

Femmes, enfants et même bébés de quelques mois… En deux décennies, l’hôpital a traité quelque 50.000 victimes de viols, des « armes de destruction massive », dit-il, « pas chères et efficaces ».

« Nous avons pu tracer la ligne rouge contre l’arme chimique, l’arme biologique, l’arme nucléaire. Aujourd’hui, nous devons aussi mettre une ligne rouge contre le viol comme arme de guerre », déclarait-il à l’AFP en 2016.

Fin novembre, un lieutenant-colonel de l’armée congolaise a été condamné à la perpétuité pour crimes contre l’humanité pour des meurtres et des viols perpétrés par ses troupes lors de l’attaque de villages dans l’est du pays en 2013.

– ‘Élément de génocide’ –

La Yazidie Nadia Murad a elle-même connu les horreurs de l’esclavage sexuel.

Comme des milliers de filles et femmes de cette communauté kurdophone du nord de l’Irak, elle a été violée, torturée et échangée par les jihadistes du groupe État islamique (EI) en 2014, avant de parvenir à s’évader.

Devenue ambassadrice de l’ONU pour la dignité des victimes du trafic d’êtres humains, la jeune femme – dont la mère et six frères ont été tués – se bat pour que les persécutions des siens soient reconnues comme génocide.

« Selon moi, la justice ne signifie pas tuer tous les membres de Daech (acronyme arabe de l’EI, ndlr) ayant commis ces crimes contre nous », a-t-elle dit après l’annonce du comité Nobel. « La justice, pour moi, c’est d’amener les membres de Daech devant une cour de justice et les voir admettre les crimes qu’ils ont commis contre les Yazidis et être punis pour ces crimes spécifiquement ».

Plus de 6.800 Yazidies auraient été retenues captives, 4.300 se seraient échappées ou auraient été rachetées, et 2.500 seraient encore « disparues », selon un rapport publié fin octobre par la Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH).

Une équipe de l’ONU commencera « début 2019 » ses investigations sur les exactions de l’EI en Irak, a annoncé son chef, le Britannique Karim Asad Ahmad Khan, mardi.

Depuis 2008, la résolution 1820 du Conseil de sécurité de l’ONU reconnaît que les violences sexuelles en temps de conflit « peuvent constituer un crime de guerre, un crime contre l’humanité ou un élément constitutif du crime de génocide ».

Le prix Nobel consiste en une médaille d’or, un diplôme et une somme de 9 millions de couronnes suédoises (environ 880.000 euros) à partager entre Denis Mukwege et Nadia Murad.

Avec AFP



Avec VOA Afrique

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