Aujourd’hui, le 12 mai 2025, c’est la Journée internationale des femmes en mathématiques. Une occasion de célébrer les contributions féminines dans un domaine longtemps dominé par les hommes.
[Mathématiques / Égalité des sexes dans les sciences] |La rédaction
Célébration du 12 mai 2025 : Journée internationale des femmes en mathématiques
Le 12 mai est désormais une date incontournable du calendrier scientifique mondial. Depuis 2018, cette journée célèbre la Journée internationale des femmes en mathématiques, aussi appelée « Fête mondiale pour les femmes en mathématiques« . Elle rend hommage à Maryam Mirzakhani, première femme à avoir reçu la médaille Fields en 2014, la plus haute distinction en mathématiques, équivalente au prix Nobel.
Née en Iran en 1977, Maryam Mirzakhani s’impose comme l’une des figures les plus brillantes de sa discipline avant son décès prématuré en 2017. Professeure à l’université de Stanford, elle est mondialement connue pour ses travaux révolutionnaires en géométrie et en dynamique des surfaces. En lui dédiant cette journée, le monde entier honore non seulement son génie, mais aussi la place légitime que les femmes doivent occuper dans les sciences.
Pourquoi promouvoir les femmes dans les disciplines scientifiques ?
Bien que les inégalités entre les sexes se soient progressivement réduites dans plusieurs domaines professionnels, les femmes restent sous-représentées dans les filières scientifiques, technologiques, en ingénierie et en mathématiques, regroupées sous l’acronyme STEM (Science, Technology, Engineering and Mathematics). Selon plusieurs études menées par l’UNESCO et l’OCDE, moins de 30 % des chercheurs dans le monde sont des femmes. Ce déséquilibre persiste malgré les compétences avérées et les contributions significatives des femmes à la science tout au long de l’histoire.
L’inclusion accrue des femmes dans ces disciplines est cruciale pour répondre aux défis complexes du XXIe siècle, notamment ceux liés à l’intelligence artificielle, au développement durable, à la cybersécurité ou encore à la santé mondiale. La diversité des profils intellectuels et expérientiels favorise en effet une meilleure prise en compte des besoins variés de la société, ce qui améliore la pertinence et l’efficacité des innovations. Par exemple, des recherches ont montré que les algorithmes d’intelligence artificielle pouvaient intégrer des biais discriminatoires lorsqu’ils étaient conçus par des équipes peu diversifiées. Une représentation plus équilibrée entre les genres permettrait donc de limiter ces distorsions et de garantir un développement technologique plus juste et inclusif.
En outre, l’absence de diversité dans les domaines scientifiques affecte non seulement la qualité des produits technologiques, mais aussi l’élaboration des politiques publiques et des normes régissant ces secteurs. Lorsque les décisions stratégiques sont prises principalement par un même groupe homogène, certaines perspectives peuvent être négligées, ce qui nuit à l’objectivité scientifique et à l’équité sociale.
Un autre facteur explicatif de cette sous-représentation féminine réside dans les stéréotypes sociaux et culturels ancrés dès le plus jeune âge. Les filles sont souvent moins encouragées à s’orienter vers les matières scientifiques, ce qui influence leurs choix scolaires et professionnels. Pour inverser cette tendance, il est essentiel de valoriser des modèles féminins visibles dans les métiers scientifiques. Ces figures inspirantes jouent un rôle clé dans la motivation des jeunes générations et dans la construction d’un environnement éducatif égalitaire.
Promouvoir les femmes dans les disciplines scientifiques, c’est donc non seulement œuvrer pour l’égalité des sexes, mais aussi renforcer la rigueur, la créativité et l’impact sociétal de la recherche et de l’innovation. Cela nécessite des actions concrètes : programmes éducatifs inclusifs, soutien aux carrières féminines en sciences, lutte contre les discriminations structurelles, et campagnes de sensibilisation. En investissant dans la mixité des talents scientifiques, la société tout entière y gagne en richesse intellectuelle, en équité et en progrès partagé.
Les grandes pionnières des mathématiques
Depuis l’Antiquité, plusieurs femmes ont apporté des contributions majeures au développement des mathématiques, malgré les obstacles sociaux et culturels souvent rencontrés en raison de leur genre. Ces scientifiques ont non seulement marqué leur discipline par leurs découvertes, mais elles ont également contribué à ouvrir la voie aux générations futures de femmes dans les domaines scientifiques.
Hypatie d’Alexandrie (v. 350/370 – 415 apr. J.-C.) est considérée comme l’une des premières figures féminines connues ayant contribué activement aux mathématiques et à l’astronomie. Philosophe néoplatonicienne, elle enseigne les mathématiques et l’astronomie à l’école d’Alexandrie, un centre intellectuel majeur de l’époque romaine tardive. Ses travaux portent notamment sur les commentaires des œuvres d’Euclide et de Diophante, ainsi que sur les modèles astronomiques de Ptolémée. Son influence intellectuelle est telle qu’elle devient une figure emblématique du savoir antique, jusqu’à sa mort tragique liée à des tensions religieuses et politiques.
Au XVIIIe siècle, Émilie du Châtelet (1706–1749) se distingue dans le domaine de la physique mathématique. Elle traduit en français les Principia Mathematica d’Isaac Newton, accompagnant cette traduction de commentaires approfondis qui intègrent les avancées contemporaines en mécanique. Cette œuvre, publiée posthumément en 1759, reste encore aujourd’hui une référence fondamentale. Elle contribue également à la diffusion des idées de Leibniz, notamment concernant la notion d’énergie cinétique, anticipant ainsi des concepts importants pour la physique moderne.
Au XIXe siècle, Ada Lovelace (1815–1852), fille du poète Lord Byron, collabore avec Charles Babbage sur son projet de « machine analytique ». Dans ses notes, elle rédige ce qui est considéré comme le premier algorithme destiné à être exécuté par une machine, anticipant ainsi les bases théoriques de l’informatique moderne. Bien que son travail n’ait pas eu d’application immédiate à son époque, il a été redécouvert et reconnu comme précurseur lors du développement des premiers ordinateurs au XXe siècle.
Sophie Germain (1776–1831) s’intéresse à la théorie des nombres et aux sciences physiques. Elle développe une approche originale pour étudier le dernier théorème de Fermat, apportant une contribution significative à la théorie des nombres. Par ailleurs, elle publie des travaux sur l’élasticité des surfaces, ce qui lui vaut une reconnaissance officielle de l’Académie des sciences de Paris en 1816 — une rare distinction pour une femme à cette époque.
Emmy Noether (1882–1935), mathématicienne allemande, révolutionne l’algèbre abstraite grâce à ses travaux sur les structures algébriques, notamment les idéaux et les anneaux. Son théorème, publié en 1918, établit une relation fondamentale entre les symétries et les lois de conservation en physique théorique, influençant durablement la mécanique classique et quantique. Malgré son génie reconnu par ses pairs, dont Einstein, elle dut longtemps enseigner sous le nom de collègues masculins en raison de ses origines juives et de son sexe.
Au XXe siècle, Katherine Johnson (1918–2020), mathématicienne afro-américaine de la NASA, joue un rôle crucial dans les missions spatiales américaines. Elle calcule avec précision les trajectoires des vols orbitaux, contribuant notamment au succès du vol spatial habité de John Glenn en 1962 et à l’atterrissage d’Apollo 11 sur la Lune en 1969.
Enfin, Maryam Mirzakhani (1977–2017), originaire d’Iran, est la première et seule femme à avoir reçu la prestigieuse médaille Fields en 2014, récompensant ses travaux sur la géométrie des surfaces de Riemann. Ses recherches, à l’intersection de la géométrie, de la dynamique et de la topologie, ont profondément marqué les mathématiques modernes.
Ces femmes, à travers leur persévérance et leur talent, ont non seulement enrichi les mathématiques par leurs découvertes, mais ont aussi défié les normes sociales de leur temps. Elles ont permis de faire progresser la science tout en ouvrant des perspectives nouvelles pour les générations futures de femmes scientifiques. Leur héritage continue d’inspirer et de rappeler l’importance de la diversité dans la communauté scientifique.
Vers un avenir plus inclusif en mathématiques
La représentation des femmes dans le domaine des mathématiques reste historiquement limitée, malgré les contributions significatives de nombreuses mathématiciennes à travers l’histoire. Selon plusieurs études et rapports statistiques, les femmes sont encore sous-représentées dans les postes académiques de haut niveau, les comités de rédaction des revues scientifiques, ainsi que dans les instances décisionnelles liées à la recherche en mathématiques. Pour remédier à cette situation et promouvoir une évolution durable, il est nécessaire d’entreprendre des actions concrètes et structurées.
Un premier levier consiste à soutenir les initiatives locales et internationales qui favorisent l’accès des femmes aux carrières scientifiques. Des programmes tels que les bourses dédiées, les dispositifs de mentorat ou encore les ateliers éducatifs ciblés permettent de réduire les obstacles structurels rencontrés par les femmes. Ces initiatives facilitent leur progression dans les filières mathématiques, de l’enseignement secondaire jusqu’à la recherche avancée. Par exemple, des organisations comme l’Association for Women in Mathematics (AWM) ou European Women in Mathematics (EWM) offrent des opportunités de réseautage, de formation et de visibilité pour les femmes chercheuses.
En parallèle, l’intégration précoce de contenus pédagogiques mettant en valeur les réalisations féminines en mathématiques peut jouer un rôle clé dans la construction d’identités professionnelles. Dès l’école primaire et au cours du secondaire, les élèves doivent être exposés à des figures féminines emblématiques telles que Emmy Noether, Sofia Kovalevskaya ou Maryam Mirzakhani, première femme récompensée par la médaille Fields. Cela contribue non seulement à briser les stéréotypes genrés persistants autour des sciences exactes, mais aussi à encourager les jeunes filles à envisager ces disciplines comme une voie professionnelle accessible.
Les institutions académiques et professionnelles ont également un rôle essentiel à jouer. Elles peuvent mettre en place des politiques actives d’égalité des sexes, notamment via la mise en œuvre de chartes de diversité, la formation des enseignants-chercheurs à la lutte contre les biais inconscients, ou encore l’adoption de pratiques de recrutement transparentes et équitables. De plus, elles doivent garantir un environnement sans discrimination, où les violences sexistes ou harcèlements ne restent pas impunis.
Enfin, il est crucial d’accroître la visibilité médiatique des mathématiciennes contemporaines. Les médias grand public, les documentaires, les plateformes en ligne et les réseaux sociaux offrent des espaces importants pour valoriser leurs parcours et leurs découvertes. Une meilleure reconnaissance publique des contributions féminines nourrit l’inspiration des générations futures et renforce la légitimité des femmes dans ce domaine.
La Journée internationale des femmes en mathématiques, célébrée chaque 12 mai, date anniversaire de la naissance de Maryam Mirzakhani, ne doit donc pas se limiter à un événement symbolique. Elle constitue une opportunité de rappeler l’importance de l’égalité des sexes dans les sciences fondamentales et d’encourager un engagement collectif en faveur d’une discipline plus inclusive, porteuse d’innovations et d’une vision pluraliste des savoirs.